De la typo avant toute chose

Le mini-site d’Émile Coquard et Louis Éveillard. http://delure.org/flux

Dans une semaine commenceront à Lurs, Alpes-de-Haute-Provence, les 66es Rencontres internationales de Lure (du 19 au 25 août 2018). Comme ces Rencontres sont vraiment, vraiment, un événement à ne pas manquer, je récapitule ici un peu tout se qui va se passer lors de cette semaine débridée de typographie, design graphique, édition, émotions et plaisirs visuels, et pas que, organisée par une équipe associative totalement indépendante et bénévole dans ce lieu magique de Lurs. Et pour moi ce sera la 20e édition, j’y étais venu pour la première fois en 1998.

À flux détendu — Jets d’encre, design liquide et flux numériques

Le plomb a fondu, l’espace de la page s’est liquéfié, on écrit comme on parle. Les yeux dans les écrans, on vit à flux tendu. Il n’y a ni pause, ni forme fixe, ni frontière. Dans les méandres ou les torrents d’informations, nous réapprenons à canaliser les données, l’énergie, l’émotion, sans les fixer. Les designers classent, organisent les circulations et balisent les trajets. Que restera-t-il de nous dans le cloud ? Sommes-nous vraiment mis à jour par nos outils graphiques ? Que faire de son temps quand on ne gagne pas d’argent ? Comment tirer parti de l’abondance typographique ? Notre corps est-il soluble dans le flux numérique ?

Dans le travail continu et les réseaux sociaux est-il possible de s’arrêter sur le rivage et d’observer la permanence du fleuve ? Se laisser porter par le courant, ou aller contre pour éprouver ses forces de résistance. À Lurs, cet été, surplombant la Durance, on se met à flux détendu du 19 au 25 août.

Le comité de programmation des Rencontres a travaillé sous la présidence d’Adeline Goyet (qui a confirmé depuis quelques années maintenant, sa conduite en douceur et le renouvellement pourtant continu de cet événement important, à l’héritage imposant) pour réunir femmes et hommes (car oui ces Rencontres sont toujours à parité depuis le milieu des années 2000, cela mérite d’être souligné) d’idées , de création et de rébellion autour de leurs expérience et de ces idées de flux de production, d’hyperconnexion, de flottement créatif, de variabilité et de trajectoire personnelle.

Cela donne un programme très riche sur une semaine, dont le détail illustré est ici, ou sur le très joli mini-site créé pour l’occasion par Émilie Coquard et Louis Éveillard.

Je ne résiste toutefois pas au plaisir de lister ici rapidement les intervenants de la semaine 2018 pour les amateurs du mode texte-seulement.

  • Marc Smith Un Feuilleton quotidien
  • Mathias Rabiot et Jérémie Fesson Graphéine, les dessous créatifs
  • Alexandre Bassi Du bouffon au Roi
  • Annie Berthier Oral écrit. Depuis Sumer, confluences et détours d’une relation à la vie jaillissante
  • Julie Blanc Paginer le flux
  • Jérémy Boy Data visualisation à l’ONU
  • Grégory Chatonsky L’hyperproduction culturelle de l’imagination artificielle
  • Jean-Renaud Dagon Le Cadratin – Atelier typographique, trente ans de passion
  • Constance Deroubaix Voyage sur l’effluve
  • Pierre Di Sciullo Donner de la voix
  • Emmanuel Fédon L’impact du numérique sur la navigation dans les espaces publics
  • Carolien Glazenburg — Why a graphic design collection is a museum ?
  • Samuel Goyet Du labil à l’écran : le texte numérique entre deux eaux
  • Anna-George Lopez Brut. Un média né du flux
  • Pierre Michaud La sypographie
  • Sébastien Morlighem Hommage à José Mendoza
  • Pia Pandelakis *Sang, larmes, sueur & co. : la matérialisation graphique de l’écoulement des corps *
  • Ian Party Fontes variables
  • Thomas Poblete Flux marins
  • Antoinette Rouvroy Homo juridicus est-il soluble dans les données ?
  • Alice Savoie Dora, Lucette, Fiona : le rôle des femmes dans les studios de dessin
  • Natalie Thiriez Journal le 1 : du yoga en origami
  • Fabienne Yvert Titre, un mot de 5 lettres
  • Mélina Zerbib Refaire et défaire Le Monde

Sans oublier les extras qui font toute la saveur de Lure, cette année :

  • Les parasols graphiques, petit marché graphique entre amis
  • Atelier pile hollandaise avec Philippe Moreau
  • Atelier papier marbré avec Garage L
  • Atelier filigrane avec Philippe Dabasse
  • Rand’eau avec Christophe Delahaye
  • Cérémonie du collier d’or
  • Pistou/piston Dîner et fanfare Brass Band fusion jazz funk en plein air !
  • Boule et Bal
  • Coup de blues final

Justin Grégoire et ses masques pour la représentation de « King Lure » (Caractère Noël 1963 via Graphéine).

Pour mieux comprendre l’étrange alchimie du lieu et de l’événement qui réunit des amoureux de la typographie depuis 66 ans, quel que soit leur âge, ou leur spécialité, je vous recommande la lecture de l’article de Mathias Rabiot sur le blog de Graphéine ainsi que le petit ouvrage collector Maximilien Vox, traits de caractères dont quelques exemplaires sont toujours disponibles. Depuis quelques années, les Rencontres sont largement ouvertes aux plus jeunes, aux étudiants et aux curieux qui, loin d’être des spécialistes, sont simplement réunis par leur intérêt pour la chose imprimée.

À suivre également, si vous ne pouvez pas vous y rendre, des flux en temps réel durant les Rencontres de Lure, avec les comptes @delurepointorg et le hashtag #lure2018. Il y a aussi un compte instagram m’a-t-on dit, mais je ne pratique pas du tout ce réseau-là :-) ou encore une page facebook.

Avis aux amateurs, photo Michel Balmont.